Décret tertiaire : c’est quoi ? Comment s’y conformer ?
Le Décret Tertiaire, ou Dispositif Éco Énergie Tertiaire (DEET), est une réglementation française introduite pour réduire les consommations énergétiques des bâtiments tertiaires. Inscrit dans le cadre de la Loi ELAN (Évolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique) promulguée en 2018, ce décret impose une diminution progressive de la consommation d’énergie finale de ces bâtiments, avec des objectifs à atteindre d’ici 2030, 2040 et 2050. L’objectif est de contribuer à la transition énergétique et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Qu’est-ce que le Décret Tertiaire ?
Le Décret Tertiaire (décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019) définit des obligations de réduction de la consommation d’énergie pour les bâtiments à usage tertiaire, que ceux-ci soient à vocation publique ou privée. Ce texte vise à réduire de 60 % la consommation d’énergie finale des bâtiments concernés d’ici 2050. Cette obligation n’est pas une obligation de moyens (les moyens à mettre en œuvre ne sont pas définis) mais une obligation de résultats.
Objectifs de réduction énergétique
Les objectifs de réduction se déclinent selon deux approches :
Objectif en valeur absolue :
Chaque type de bâtiment, selon son usage (bureaux, commerces, enseignement, santé, etc.), doit atteindre un seuil de consommation fixé en kWh/m²/an. Ce seuil est établi par arrêté et peut varier en fonction du type d’activité tertiaire exercée dans le bâtiment.
Objectif en valeur relative :
Il s’agit de réduire la consommation d’énergie finale par rapport à une année de référence. Cette année de référence doit être choisie entre 2010 et 2019. Les cibles de réduction sont de :
- 40 % d’ici 2030,
- 50 % d’ici 2040,
- 60 % d’ici 2050.
Qui est concerné par le décret tertiaire ?
Le décret s’applique à tous les bâtiments ou locaux d’activité à usage tertiaire dont la surface de plancher est égale ou supérieure à 1 000 m². Les locaux concernés peuvent inclure :
- Bâtiments exclusivement tertiaires (bureaux, commerces, établissements de santé, écoles, etc.),
- Locaux partiellement tertiaires, à condition que la surface cumulée dédiée à un usage tertiaire soit supérieure ou égale à 1 000 m²,
- Ensembles de bâtiments situés sur une même unité foncière ou sur un même site, si la surface cumulée à usage tertiaire atteint ou dépasse 1 000 m².
Exceptions : les constructions provisoires, lieux de culte, et les bâtiments affectés à des activités opérationnelles de défense, de sécurité civile, ou de sûreté intérieure sont exclus du champ d’application.
Comment se Conformer au Décret Tertiaire ?
Pour se conformer aux exigences du Décret Tertiaire, il est essentiel de suivre un processus structuré qui implique à la fois des actions techniques et comportementales. Voici les étapes recommandées par les experts :
1. Réaliser un audit énergétique Initial
Celui-ci sera indispensable pour :
- Évaluer la consommation actuelle et identifier les postes les plus énergivores.
- Définir une année de référence pour le calcul de la réduction relative.
- Proposer des pistes d’amélioration basées sur les meilleures pratiques d’efficacité énergétique.
2. Élaborer un Plan d’actions énergétiques
Une fois l’audit réalisé, il est nécessaire de développer un plan d’actions énergétiques comprenant :
- Travaux de rénovation : amélioration de l’enveloppe thermique du bâtiment (isolation des murs, toitures, et planchers) pour minimiser les déperditions thermiques.
- Modernisation des équipements : remplacement des systèmes de chauffage, ventilation, climatisation et éclairage par des équipements plus performants et moins énergivores.
- Installation de systèmes de gestion active : utilisation de systèmes de Gestion Technique de Bâtiment (GTB) pour automatiser et optimiser la gestion énergétique.
3. Suivi continue des consommations
La plateforme OPERAT, gérée par l’ADEME, est l’outil principal pour le suivi et la déclaration des consommations énergétiques. Les bâtiments concernés doivent y déclarer :
- La description des activités tertiaires exercées,
- La surface des bâtiments concernés,
- Les données de consommation d’énergie annuelle par source énergétique,
- Les modulations éventuelles en cas de contraintes spécifiques.
Les assujettis sont tenus de déclarer chaque année leurs consommations d’énergie avant le 30 septembre pour l’année précédente.
4. Sensibilisation et formation des occupants
Pour atteindre les objectifs de réduction énergétique, il est indispensable de sensibiliser les occupants des bâtiments à l’importance des économies d’énergie. Cela peut inclure des campagnes de formation sur les écogestes (extinction des lumières, réduction de la température de chauffage, etc.) et la gestion responsable de l’énergie.
5. Utilisation de logiciels de suivi énergétique
Des outils comme DeltaConso Expert permettent un suivi en temps réel des consommations énergétiques et offrent des fonctionnalités avancées telles que :
- La gestion centralisée des données énergétiques,
- L’optimisation des consommations par des algorithmes intelligents,
- L’intégration avec la plateforme OPERAT pour simplifier la déclaration des consommations.
Modulation des objectifs et cas particuliers
Le décret prévoit des possibilités de modulation des objectifs en cas de :
- Contraintes techniques (bâtiments historiques, sites protégés),
- Contraintes économiques (coûts disproportionnés des actions par rapport aux bénéfices),
- Changements d’usage ou de volume d’activité dans le bâtiment.
Pour bénéficier d’une modulation, un dossier technique détaillant les contraintes et justifiant les ajustements demandés doit être soumis avant la date limite de modulation (30 septembre 2026 pour la première décennie).
Quelles sanctions en cas de non-conformité ?
Le décret prévoit plusieurs niveaux de sanctions pour les établissements non conformes :
- Mise en demeure : si les données ne sont pas transmises ou si les objectifs ne sont pas atteints, l’établissement reçoit une mise en demeure.
- Publication sur un site public (name and shame) : en cas de non-conformité persistante, le nom de l’établissement peut être publié sur un site internet des services de l’État.
- Amendes administratives : jusqu’à 1 500 € pour les personnes physiques et 7 500 € pour les personnes morales.
En cas de manquement répété ou de refus de se conformer aux exigences du décret, des actions plus sévères peuvent être envisagées(Brochure-Decret-Tertiai…).
Préparer l’Avenir : stratégies et recommandations
1. Engager une stratégie long terme
Les experts recommandent de commencer dès maintenant la planification des actions de réduction énergétique. Bien que la première échéance soit en 2030, une approche proactive permet de :
- Réduire progressivement les charges d’exploitation,
- Améliorer la valeur patrimoniale des bâtiments,
- Éviter les pénalités et sanctions.
2. Investir dans des solutions durables
Les investissements dans des technologies d’efficacité énergétique (isolation performante, systèmes de chauffage et de climatisation modernes, etc.) peuvent avoir un retour sur investissement rapide grâce aux économies d’énergie réalisées.
3. Utiliser des contrats de performance énergétique (CPE)
Les CPE sont des accords entre le propriétaire/gestionnaire d’un bâtiment et un prestataire énergétique, garantissant une réduction minimale des consommations. Ces contrats permettent de partager les risques financiers et d’assurer une performance optimale.
4. Mettre en ouvre des programmes de formation et de sensibilisation
L’adoption de programmes de formation continue pour les gestionnaires et occupants des bâtiments est essentielle pour maintenir les gains d’efficacité énergétique et pour encourager des comportements économes en énergie.
Pour conclure
Le Décret Tertiaire impose aux acteurs du secteur tertiaire des objectifs ambitieux de réduction des consommations énergétiques, alignés sur les engagements climatiques de la France. En s’y conformant, les entreprises et organisations non seulement contribuent à la lutte contre le changement climatique, mais aussi réduisent leurs coûts opérationnels et renforcent leur résilience énergétique. Une approche proactive et bien planifiée est cruciale pour naviguer efficacement dans cette nouvelle ère de sobriété énergétique.